Je n’y connais pas grand-chose en danse, mais j’aime beaucoup ça. Par habitude, je sors plutôt au théâtre, mais j’ai commencé à voir de la danse il y a quelques saisons, une peu à l’Opéra, un peu à l’étranger, surtout dans le cadre de mon abonnement au Théâtre de la Ville (et sur Youtube).
Pourtant, j’ai eu un premier choc émotionnel grâce à la danse il y a presque dix ans : je zappais de chaîne en chaîne quand je suis tombée sur le tout début d’un film de danse d’une petite demi-heure sur arte. Je voyais des gens sauter et glisser sur des tables, je n’y comprenais rien, mais j’étais scotchée et j’ai finalement regardé One Flat Thing, Reproduced de Forsythe en entier. Pendant quelques années, je n’y ai plus pensé, j’ai recroisé le nom de William Forsythe, j’ai passé des heures sur Youtube, je suis devenue accro. Il y a dans ses chorégraphies une géométrie de la souplesse, une précision de la déconstruction et un classicisme contemporain qui me parlent et me touchent.
Quand on le voit danser, on retrouve une forme d’harmonie de la folie qui intrigue, captive et hypnotise.
Bien que j’aie eu la chance d’assister à plusieurs représentations des oeuvres de Forsythe au fil des années, c’est avec une impatience toute particulière que j’ai attendu le dernier Festival d’Automne, où le chorégraphe était à l’honneur.
Ca a été l’occasion d’écouter Jone San Martin, l’un des plus anciennes danseuses de la Forsythe Company, expliquer la notation du chorégraphe, la liberté donnée aux danseurs, la façon dont ils interagissent entre eux.
Mais ce Festival d’Automne m’a surtout permis de revoir One Flat Thing, Reproduced, sur scène, en vrai, par le Ballet de l’Opéra de Lyon. Cette chorégraphie, je l’ai dévorée sans en perdre la moindre couleur ni le moindre mouvement. J’y ai vu des dynamiques que j’avais oubliées ou qui m’avait échapées, les danseurs en écho ou en opposition. Forsythe a fait du quadrillage de tables, une surface vivante, un support où les danseurs rebondissent, où ils esquissent un pas de deux, où ils créent un solo. Dix ans plus tard, j’ai redécouvert avec un plaisir non dissimulé cette matière organique mouvant sous l’entêtante musique de Thom Willems.
Dix ans plus tard, l’émotion était toujours là, peut-être même renforcée par l’émotion du souvenir.