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Si vous avez une forme extrême de syndrôme prémenstruel, la bonne nouvelle c’est que nous sommes légions ! La mauvaise, c’est que ça n’est peut-être pas un SPM, mais un TDPM (trouble dysphorique prémenstruel), ou PMDD en anglais. Consultez votre généraliste pour plus d’infos sur comment limiter l’impact du PMDD sur votre vie, discutez-en sur Reddit, en tapant “pmdd” dans la barre de recherche d’Instagram, et parlez-en à vos ami·e·s (qui vous écouteront mais ne comprendront sans doute pas complètement, même s’iels sont des êtres merveilleux).

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Je pense beaucoup à la mort. Je suis même en train de penser à la mort alors que j’écris ces mots. Je dirais même que c’est parce que je pense à la mort que je suis en train d’écrire.

Je réfléchis à des façons de mourir (aucun endroit assez haut d’où sauter ; les couteaux, c’est salissant ; pas sûre d’avoir des médicaments qui garantissent une mort sans douleur). Je réfléchis à qui viendrait à mon enterrement (pas très pratique d’avoir des proches dispersés entre deux pays, à vrai dire) et quelles tenues mes proches porteraient (j’espère qu’il y aura des sequins). Je réfléchis à qui préviendrait qui (peut-être est-il temps de créer une liste de quelques personnes qui pourraient prévenir le plus de gens possible). De la logistique, en somme.

Je pense à la douleur que ça causerait à certains de mes proches, et c’est ce qui me retient : en creusant assez longtemps, je me rends compte que ça ira mieux demain, avec des choses qui valent d’être vécues et des gens qui valent d’être revus. 

Mais je ne sais pas trop quand sera demain, et en attendant, je me sens lourde, comme si rien ne pouvait me sortir d’un puits de néant, comme si ça n’était même pas la peine d’essayer. Parfois je pleure tout doucement, par intermittence, sans pouvoir contrôler les larmes. Parfois j’ai envie d’être seule et de me soulager par les sanglots, mais pas une larme ne vient. Parfois je suis entourée de gens et toute mon énergie est utilisée à faire semblant.

Je suis coincée, tout simplement. Émotionnellement, créativement, socialement, physiquement coincée.

J’aimerais pouvoir dire que je suis triste, mais je ne ressens rien.

Le pouvoir que les hormones ont sur le cerveau est déstabilisant. Elles me donnent l’impression que ce que je contrôlais dans ma vie est en train de m’échapper. Je n’apprécie plus rien parce que plus rien n’est appréciable. Je me vois faire des choses que je devrais aimer, voir des gens que je devrais aimer, et je ne ressens rien à par un trou noir, infini, froid, saupoudré de panique étouffante, comme si j’étais dans un caisson à oxygène sans savoir comment respirer. Je me surprends d’ailleurs souvent en pleine apnée, étranglée par un mélange d’anxiété et de désespoir.

Je finis par éviter des choses que je devrais aimer parce qu’ajouter la frustration au vide intérieur me fait dérailler. Et j’évite certaines personnes que j’aime pour éviter de créer le malaise. Ça pourrait être facile d’articuler : « Je suis en dépression sévère cette semaine. Oui, j’allais bien il y a trois jours et ça ira sans doute mieux dans quelques jours, j’espère, mais cette semaine, rien ne va », mais c’est tout sauf facile. Et c’est ainsi que je me sens coupable de ne pas profiter de la vie, mais aussi de ne pas oser exprimer pourquoi.

J’en ai parlé à certaines personnes, mais pas la majorité de mon entourage. Le sujet est gênant et je n’ai pas envie de le faire porter aux autres – ou pire, de le voir minimisé. L’un dans l’autre, j’ai tout pour aller bien, alors qu’est-ce que j’ai à regarder dans le vide ?

J’ai honte d’être aussi impuissante, et cette impuissante est paralysante. J’ai honte parce que les questions de santé mentale sont parfois encore banalisées et que, même moi, j’ai du mal à croire que je ne suis pas la même personne d’une semaine à l’autre – et que j’ai perdu des contrats et des relations sur l’autel du TDPM. J’ai honte parce que j’ai refusé les traitements proposés par ma généraliste, qui m’avait prévenue qu’ils pourraient impacter le reste de ma vie, sans forcément régler le problème. J’ai choisi de gérer autant que possible en changeant mes habitudes alors qu’il y avait des options médicamenteuses, alors je l’ai un peu cherché, non ?

Pourtant, je m’obstine à faire des choses que j’aime, les plus faciles et les plus routinières, au cas où quelque chose me ferait ressentir un truc. Et pour avoir l’impression que ces journées ne sont pas complètement perdues et que je fonctionne malgré tout, même si c’est faux. Mon rythme de sommeil, mon alimentation, mes réactions, mon corps, rien ne va. 

Un peu comme si je n’avais jamais été heureuse et ne le serais jamais, tout en sachant que c’est une semaine de brouillard éternel, le temps que le sang chasse les larmes.

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