Avez-vous déjà vu une artiste qui crée elle-même, en plus de ses oeuvres, l’intégralité des outils et meubles qui lui servent à produire et à conserver ses créations ? C’est ce que fait In-Sook Son Cette artiste qui n’avait jusque là jamais exposé en dehors de la Corée perpétue la tradition de la broderie, qui était il y a quelques générations l’une des rares activités des Coréennes. L’exposition Intérieur coréen qui lui est consacrée au In-Sook Son du musée Guimet mêle ses créations à celles de sa mère et de sa grand-mère et permet de voir à quel point In-Sook Son a perfectionné l’art de la broderie.
La pièce la plus impressionnante est sans nul doute une robe de mariée, richement brodée pendant de longues années, mais on y trouve aussi de nombreux pojagi (foulards servant de bourse pour les effets personnels des femmes) et petits sacs. Et oui, la Corée, c’est aussi l’art d’emballer, de protéger les objets (à l’image des furoshiki japonais, peut-être plus connus chez nous). C’est peut-être dans le même esprit que In-Sook Son a choisi de travailler avec des artisans traditionnels coréens pour créer son mobilier : des commodes, paravents, tables, vitrines ien bois et ornés de broderies tellement fines qu’elles ont l’air de nacre. In-Sook Son prend tout de même quelques libertés face à l’ancien, par exemple en adaptant la forme d’un hanbok à la silhouette de celle qui le portera. Elle a ainsi refusé de devenir patrimoine national coréen – distinction obligeant à respecter à la lettre les traditions de création – on sent pourtant, en visitant Intérieur coréen à la suite de Tigres de Papier qu’elle est la digne héritière de nombreux siècles d’Histoire visuelle.
Tigres de papier est une plongée dans un univers visuel extrêmement riche et teinté d’échanges avec toute l’Asie et avec l’Occident. De ce pays dont le grand public sait finalement peu de choses (non, Psy, les restos coréens du Fooding et la kpop ne comptent pas vraiment), on comprend pourquoi il a longtemps été appelé le pays du blanc, l’importance des intérieurs et l’univers de faune et de flore.On y entre avec délectation, tant les meubles, peintures, objets présentés ravissent de leurs détails suprenants (saurez-vous trouver la licorne sur la carte du monde ?), de leur côté bucolique, de leur modernité. Les cinq siècles de l’exposition dessinent les paysages et scènes d’intérieur, les animaux réels et imaginaires, les encres sur papier et les objets usuels. On pourrait passer des heures à observer le travail des détails et la pureté des courbes pour se laisser imprégner par la Corée. Mon conseil : pour en profiter pleinement, inscrivez-vous à une visite guidée qui vous permettra de mieux saisir le contexte et les subtilités des oeuvres exposées.
Merci beaucoup au Musée Guimet pour son accueil et l’exceptionnelle visite de ces deux expositions !
Intérieur Coréen est à voir jusqu’au 14 mars 2016, et Tigres de Papier, vous permettra de mieux comprendre Intérieur Coréen se finit le 22 février 2016. Et pour l’article de Claire, férue de Corée, c’est ici.